Paul Virilio, 86 ans, a succombé à un arrêt cardiaque le 10 septembre et a été inhumé dans l’intimité le 17 septembre. Sa famille a rendu publique l’annonce de sa disparition mardi 18 septembre. Cette relative lenteur était dans sa manière. Il n’aimait guère le spectaculaire, détestait l’esbroufe et se méfiait plus que tout du culte de l’accélération qui a envahi nos sociétés.
EXTRAIT : L’Humanité : Article paru dans l’édition du 22 février 2002.
La tyrannie de l’instant par Paul Virilio
La réalité de l’historique, c’est son présent. L’histoire passe, mais il y a un moment où elle est » présent « . Or il y a une tyrannie aujourd’hui du temps réel, de l’immédiateté, de l’ubiquité, de l’instantanéité. Cette tyrannie commence effectivement à être présente dans ce qu’on appelle la mondialisation. La mondialisation est une mondialisation au niveau du temps, et non pas au niveau de l’espace. Les antipodes sont toujours aux antipodes, les ruptures sociales entre le Nord et le Sud sont toujours là, les climats n’ont pas changé. La mondialisation, c’est le fait d’arriver dans ce point unique, qui est un point absolu, délirant, où il n’y a plus que du présent, de l’immédiateté. Je crois que les lofts, les squats sont des tentatives de retrouver un territoire, parce qu’il est impossible de s’en passer. Cette recherche de reterritorialisation représente une tentative de retour à l’espace réel. Il ne s’agit pas d’un » retour » dans le sens nostalgique. Personnellement, je me demande comment nous avons pu nous laisser piéger par l’idée d’un sixième continent totalement virtuel, la cybermentalité, totalement en apesanteur, où l’art serait enfin délivré de toutes les contingences au profit de signes, de chiffres. (…)
Lire ou relire son œuvre …