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A lire en complément du dossier spécial « BIM : la montée en puissance » à paraître dans le Passion Architecture N° 48 – Haute et Basse Normandie, page 25
Avant de plonger au cœur du BIM, chacun de nous sait que dès lors que nous débutons des études pour la réalisation d’un ouvrage, les décisions que nous prenons ainsi que les processus de conception que nous mettons en place auront une incidence sur celui-ci et sur son contexte, et ces incidences sur l’ouvrage se poursuivront jusqu’à ce qu’il soit démoli. Au préalable des ces études, nous devons également trouver dans le programme qui nous sert de base les informations nous permettant à la fois de cerner les demandes implicites et explicites, demandes que nous allons réinterroger et affiner à mesure que le travail de conception se poursuit.
Je vais essayer ici de vous présenter ce qu’est le BIM, pourquoi il s’agit d’un outil de conception qui renforce la compétitivité de nos agence et remet au centre nos métiers, pourquoi cet outil est adapté à toutes les tailles d’agence et à toutes les tailles et tous les types de programme, pourquoi il est plus simple à mettre en place plus l’agence est petite, et enfin pourquoi il est urgent de s’y mettre même si le système n’est pas encore 100% au point. Pour cela, il ne va pas être question de rentrer dans le détail technique des fonctionnements, des spécificités techniques, ou de discussions de pointe en informatique. Vous trouverez sur internet nombre de communications précises et pointues sur le sujet, et ces précisions seront largement développées dans le prochain numéro de Passion Architecture. Non, mon propos est plutôt d’essayer de faire comprendre les principes fondamentaux, pour qu’ensuite chacun puisse s’approprier cet enjeu, selon la structure de son agence et sa politique de développement et d’investissement, et adapter le BIM a ses pratique, car c’est un outil sur mesure.
Et, rassurez-vous, nous sommes quelques agences à l’avoir mis en place, et il nous semble inenvisageable de revenir en arrière : que ces agences soient de taille importante, ou toute petite comme la mienne, qui ne compte que deux personnes aujourd’hui. Et sans avoir attendu que le BIM soit 100% opérationnel dans son utilisation la plus large, nous pouvons déjà mesurer les importants progrès que cet outil nous apporte, autant du point de vue de sa fiabilité que de son efficacité. Et donc de la rentabilité des investissements réalisés.
La version numérique de nos pratiques opérationnelles concrètes
Si on l’aborde comme un système, notre métier consiste à la fois en la manipulation de données – certaines que l’on nous fournit et d’autres que l’on produit – et en une capacité à porter un processus qui va permettre à l’équipe, entreprises incluses, de livrer un ouvrages conforme aux attentes du maître d’ouvrage et qui s’inscrive avec justesse dans un contexte. Le processus et la façon dont on l’opère permettent d’assembler ces données, et de produire un projet d’architecture. Ainsi, nous connaissons à la fois l’ensemble du vocabulaire (murs, portes, lumière, thermique, dalle, etc.) et la grammaire (jonction, interface, assemblage, couches, textures, etc.), et c’est notre capacité à manipuler et à hiérarchiser cette langue de l’architecture qui nous permet de donner corps, dans l’ouvrage que nous livrons, aux attentes exprimées dans nos commandes.
Et en guise de témoignage de tout ce travail effectué, nous livrons un bâtiment à notre maître d’ouvrage, et lui fournissons un carton dans lequel se trouve de façon plus ou moins ordonnée et complète l’ensemble des ouvrages réalisés, et dont une partie est archivée sur DVD. Ce carton termine ensuite, et dans le meilleur des cas, dans une salle d’archives, et les données du DVD sont copiées sur un serveur. Puis….. plus rien, tant qu’aucun dommage n’apparaît, ou tant qu’aucune modification n’est prévue. Sans doute peut-on y voir le fait que nos pratiques actuelles sont avant tout axées sur la construction et non pas sur la gestion du patrimoine que nous livrons, ou tout au moins que l’état des données que nous collectons dans les DOE est d’un intérêt très limité pour la gestion de l’ouvrage que nous avons livré.
Or nous le savons, chaque euro investi en amont de la construction d’un projet doit permettre de réduire son coût global, que celui-ci soit économique ou écologique. Dès lors, si nous ne sommes pas en mesure de fournir des données exploitables, comment proposer et suivre avec efficience des solutions pertinentes, et en même temps valoriser nos conceptions ?
C’est à cela que s’attache le B.I.M., et c’est ce que des pays, des maîtres d’ouvrages, des organisations associatives ou gouvernementales, des industriels, des architectes, des bureaux d’études, des entreprises, et des éditeurs de logiciels ont compris : créer une norme commune, un langage commun, qui soit l’image numérique et fidèle de ce qu’est l’acte de construire ; langage qui permet de travailler ensemble sur un même modèle numérique – copie virtuelle de l’ouvrage en devenir, puis copie virtuelle de l’ouvrage exécuté – et qui permette de renforcer les compétences de chacun tout en donnant enfin à l’exploitant de l’ouvrage la possibilité de le gérer dans la juste continuité de sa conception et construction, et d’en apprécier les qualités.
Et de cela, les maîtres d’ouvrages en sont convaincus, et ils sont en train de réfléchir aux moyens d’y parvenir. Et l’on devine que l’application du BIM ne sera pas exigée en fonction de la taille d’un projet, mais pour tous les projets d’un maître d’ouvrage qui sera passé au BIM, simplement parce qu’il voudra gérer l’ensemble de son patrimoine sur une seule et même base de donnée.
Le BIM : ouvrage virtuel et management de projet
Bientôt, c’est à dire d’ici deux ou trois ans, les maîtres d’ouvrages nous commanderont une copie numérique du projet que nous, maîtres d’œuvre, leur livreront. Cette copie numérique sera la copie conforme du bâtiment : ce sera un objet en 3D dans lequel sera intégré l’ensemble de ses données de programmation, de conception, de construction, ainsi que les données nécessaires à sa maintenance et à son exploitation. Et ces types de données nous seront communiqués dans le programme que l’on nous fournira.
Cette maquette numérique évoluera tout au long du cycle de vie de l’ouvrage, et selon le rythme de celui-ci. Ainsi, dès l’esquisse, tous les intervenants de la maîtrise d’œuvre élaboreront leur conception sur un modèle unique partagé, et, simultanément à un processus classique et progressif de conception, s’établira un processus de production et de gestion de ces données.
La maquette numérique n’est donc pas juste un nouvel outil de conception, c’est aussi un outil de production et de gestion de données exploitables par tous et à toutes les phases. C’est donc à la fois un processus qui débute dès la conception, et sa base de données qui y est rattachée et qui est implémentée au fur et à mesure de l’avancement du projet. C’est cela le BIM, dont l’acronyme veut dire, et uniquement dire : Building Information Model (la base de données) et Building Information Management (le processus).
Et ce n’est rien d’autre que la traduction numérique de la pensée que chaque architecte met en œuvre pour concevoir un projet, puis veiller à sa réalisation. Et pour revenir à ce que nous disions avant : les objets que nous manipulons dans la maquette sont les copies exactes des objets que nous prescrivons, et le processus BIM n’est autre que la réplique de la façon dont nous sommes capables de donner corps à un projet, petit à petit, en incorporant de plus en plus de données au fur et à mesure que nous enrichissons le projet. C’est donc à la portée de tous les architectes, car la génétique du processus BIM est similaire à celle du projet tel que nous le pratiquons intellectuellement. C’est même plus simple que nos pratiques courantes, puisqu’avec le BIM nous construisons le projet de proche en proche, sans avoir à passer par une représentation graphique qui par nature tronque les intentions. C’est aussi simple que de faire une maquette d’étude en carton que l’on ferait évoluer petit à petit vers un bâtiment réel, pour peut que l’on se forme aux logiciels et que l’on comprenne les implications que cela a auprès de nos partenaires.
Quand au langage en lui même, c’est à dire la traduction numérique du vocabulaire et de la grammaire de nos métiers, l’architecte n’aura à terme plus à s’en soucier, car ce langage normalisé sera intégré aux logiciels que lui et l’ensemble des autres intervenants utilisent, et la fiabilité des données sera garantie. La base de données sera commune à tous, et chacun aura, par le biais de son logiciel, la représentation des données selon les spécificités de son métier. Ce que l’on appelle sa vue métier. Par exemple, le thermicien lira la performance de chaque élément de l’enveloppe, l’ingénieur structure renseignera directement dans une poutre des caractéristiques structurelle, et l’architecte ouvrira autant de vues que nécessaires (plans, coupes, élévations, etc.). Dans l’autre sens, lorsqu’un architecte modélisera un mur, le thermicien pourra directement y indiquer sa performance thermique, l’ingénieur structure sa capacité portante, etc. Ainsi, grâce à cette même vue métier, l’architecte en modélisant renseignera automatiquement la base de données sans avoir à s’en préoccuper.
Nous pourrons ainsi concevoir un projet, en intégrant l’ensemble du travail des membres de la maitrise d’œuvre sur un même objet numérique, selon un processus de conception commun, et sans avoir à ressaisir les données des uns et des autres car, grâce à ce langage commun, chacun aura immédiatement accès aux données et au travail des autres. En d’autres termes, la maîtrise d’œuvre construira un chantier numérique dont le résultat, à la fin des études de conception, sera l’image virtuelle en 3D et renseignée du bâtiment à réaliser. Et pour le pratiquer depuis quelques années, c’est non seulement nettement plus satisfaisant que d’utiliser des vieux outils de dessins en 2D, cela permet de fiabiliser et d’optimiser les temps d’études en réduisant les temps de saisie et de dessins devenus inutiles (que l’on se rassure, les dessins d’intentions conservent toutes leur pertinence, tout comme des maquettes d’études en carton). Le temps libéré est ainsi rendu à la conception et à la réflexion. Et l’on sait tous quels sont les délais actuels dans lesquels ont nous demande de travailler.
Vous l’aurez compris : une des conséquences principales de ce processus BIM, et qu’il est important de bien intégrer dans l’appréhension de la mutation d’une agence, se situe dans la modification des séquences de travail. Pour schématiser, avant le BIM et dans un processus classique, le travail est séquentiel : l’architecte commence à faire une esquisse seul, puis demande aux bureaux d’études de travailler sur les fonds de plans qu’il aura dessinés en 2D. Les bureaux d’étude saisissent ensuite leurs éléments et produisent leurs propres documents, qui viennent s’ajouter à ceux de l’architecte. Puis l’architecte opère une synthèse, et on recommence. A chaque fois, il y a ressaisie, avec risque d’erreur, de perte d’information, d’incompréhension, et également le fait que les bureaux d’études ne puissent pas apporter d’idées intéressantes, car ils sont suiveurs, et ont une navigation limitée dans le projet. Avec le BIM, tout est différent avec un processus simultané et partagé; et c’est la raison pour laquelle apparaît une fonction essentielle, celle de BIM Manager. Et c’est là qu’il est question d’interopérabilité, puisque chacun doit être en mesure d’accéder aux éléments produits par ses partenaires sans avoir à les ressaisir et en ayant la certitude que ces éléments sont bien traduits dans son logiciel.
L’interopérabilité, et l’état de sa mise en œuvre dans les métiers de la construction
Pour reprendre ici de façon concise l’introduction de l’article qui y est consacré sur Wikipedia, l’interopérabilité est la capacité d’un produit ou d’un système à fonctionner avec d’autres systèmes ou produits existants ou futurs, et ce, sans restriction d’accès ou de mise en œuvre. L’interopérabilité est donc une notion transversale qui permet à des outils de communiquer ensemble[1].
L’idée est que celui qui se sert par exemple d’un outil de conception, de management de projet, de dimensionnement, de planification de chantier, ou de gestion patrimoniale n’ait pas à se soucier du logiciel qu’utilisent les autres pour travailler. Ce qui implique qu’il y ait un langage commun, indépendant des logiciels et pour lequel l’utilisateur n’a pas à se soucier. En d’autres termes, il faut que ce langage soit une norme. Et c’est là que l’on comprend son intérêt pour la fiabilité de nos études et nos gains de productivité : il n’est plus utile de ressaisir les données déjà produites, et il est possible de travailler directement dessus si elles ont été produites par une autre personne.
Wikipedia prend l’exemple de la téléphonie mobile : » Un système interopérable est le téléphone. Toutes les interfaces sont des normes gérées par l’UIT-T. On peut ainsi téléphoner sans se soucier de la marque de téléphone de son correspondant ni des matériels utilisés par les différents opérateurs. »
Pour en revenir à nos pratiques, cela signifie simplement qu’à terme, nous n’aurons plus à nous soucier des logiciels des autres intervenants, entreprises incluses, ni de leur moyens de production. Ce qui est aujourd’hui déjà le cas, diront certains à juste titre, car lorsqu’on donne son plan papier à une entreprise, on lui laisse ensuite le soin de s’en débrouiller. Sauf que l’on sait tous également ce que cela implique en perte de qualité, de mauvaise compréhension du projet et d’interprétation fausse, etc., et de remises en questions souvent infondées de la qualité de nos conceptions. Et, si l’on ajoute la perspective de la demande du maître d’ouvrage de gérer son patrimoine grâce à une copie virtuelle de son bâtiment, on saisit immédiatement l’intérêt de cette interopérabilité.
Mais, et c’est une réalité, cette interopérabilité n’est pas encore totalement opérationnelle dans notre secteur. Et il faut en avoir conscience dans la mise en place de la stratégie de mutation de nos agences, pour que la mutation soit progressive et coordonnée avec l’imposition du BIM comme finalité. L’interopérabilité n’est pas encore 100% au point, mais elle le sera à moyen terme : efficace et totalement opérationnelle. D’ici deux ou trois ans, pas plus. Et c’est la raison pour laquelle il est urgent de s’y mettre, et de faire muter nos agences, chacune à son rythme, vers une modification gagnante de son organisation vers des outils et des processus 3D, puis interopérables. Mais nous verrons cela plus loin.
Il nous reste en effet à évoquer la façon dont la conception devra être gérée autour de cette interopérabilité, et ce vers quoi la profession d’architecte doit tendre pour continuer à garantir sa mission d’intérêt public : vers le BIM management. Et, pour avoir eu un parcours d’ingénieur avant de devenir architecte, j’ai acquis cette conviction que seuls les architectes ont été formés à cette structure intellectuelle spécifique qui permet de piloter le BIM.
Le BIM Management
Le BIM management est une mission complémentaire à celle de nos missions complètes de maîtrise d’oeuvre. Elle ne consiste pas à réaliser un modèle en 3D, ni à concevoir en 3D. Elle consiste à piloter le travail autour de la maquette numérique de façon à ce qu’elle soit à la fois bien modélisée et bien renseignée (gérer la base de données), et à gérer les interfaces entre les différentes personnes qui travaillent dessus. (gérer le processus)
Le premier aspect, celui de la vérification de la conformité du projet numérique avec les besoins du gestionnaire du patrimoine en terme de données est essentiel car c’est lui qui va garantir que les données sont à la fois complètes (pas d’oubli), sans doublon, et que les ouvrages sont correctement modélisés. En d’autres termes, cela consiste à vérifier que chaque intervenant travaille correctement sur le modèle. Tout comme sur un chantier on vérifie la bonne réalisation des ouvrages, le BIM manager vérifie leur bonne modélisation.
Le second aspect, celui de la gestion des interfaces, consiste en une pré-synthèse, et en ce sens il touche à la conception même de l’ouvrage. Prenons un exemple, comme le BET structure et le BET fluide travaillent en même temps sur le même bâtiment virtuel, il est certain que des réseaux modélisés en 3D (et en raison de leurs dimensionnement) viendront buter contre des poutres dimensionnées pour des questions structurelle. Il s’agit d’un clash à résoudre : soit on réduit la taille de la poutre, soit on fait passer le réseau ailleurs. Le travail du BIM manager va consister ici à faire une pré-synthèse de tous les clashs, puis de donner les instructions pour que chacun modifie ses ouvrages en conséquence. Et bien entendu, même s’il s’agit d’une mission parallèle, on voit aisément en quoi elle peut impacter la conception puisqu’elle priorise les décisions dans un processus de conception continu.
L’on peut donc voir aisément que cette mission, si elle est parallèle à nos missions complètes, peut aller à l’encontre du projet dans son sens le plus large si elle n’est pas menée avec intelligence. D’où l’importance qu’elle soit réalisée par des personnes qui portent en même temps l’intérêt global du projet. Elle peut également aller à l’encontre de nos agences si celles-ci ne sont pas en mesure d’utiliser l’outil… Et dans le pire des scénarios, le rôle de nos agences se limitera à faire des croquis, puis des techniciens se chargeront de tout le reste…
La simplicité de la mise en place dans les petites structures – la simplicité de la conception en 3D
Le passage d’une agence au BIM est d’autant plus simple que la structure est petite, tout comme le retour sur investissement est facilement maîtrisable et rapide. Simplement parce que plus le nombre d’intervenants est faible, plus les échanges de données sont réduits, et plus il est simple de faire muter l’organisation de son agence autour de l’outil.
Prenons le cas d’un confrère qui gère seul ses projets – de la conception, à l’établissement des contrats travaux et au suivi de chantier – et qui est spécialisé dans des projets de maisons. Il pourra tout gérer de façon centralisée, et se servir de la maquette numérique pour tout faire : concevoir son projet très simplement en 3D (avec un gros gain de productivité), faire ses études thermiques de façon parallèle et autonome, intégrer les contraintes techniques qu’il juge utile de préciser (fluides, éléments de structure), extraire simplement ses quantités, fiabiliser le coût construction et les négociations, établir et suivre un planning, suivre l’exécution du chantier, de façon très simple.
D’une façon schématique : il débutera son esquisse avec un modèle 3D simple, peu renseigné, puis plus les phases vont avancer, plus ce modèle sera simplement enrichi. En même temps qu’il travaillera son parti architectural, il pourra en direct le confronter à la performance thermique, en intégrant directement les apports solaires. Il pourra également en direct suivre l’évolution du projet par rapport au programme, extraire toutes les données dont il aura besoin. Il pourra également travailler sur un même objet l’espace, la structure, la lumière, etc. Et lorsqu’une modification sera nécessaire, la maquette numérique réagira en direct et recalera tous les autres aspects du projet.
Et que l’on se rassure, la conception en 3D est aujourd’hui d’une très grande simplicité pour la plupart des projets courants. Les outils à disposition ont des interfaces intuitives et précises, et une formation de quelques jours permet de les prendre en main, et d’en maîtriser rapidement la potentialité. Imaginez le retour sur investissement : vous modélisez, ce qui revient simplement à construire le bâtiment que vous projetez. Puis, simplement et avec un minimum de configuration, vous êtes en mesure d’extraire toutes les vues graphiques du projet : vous ne dessinez plus de plans etc…, vous passez votre temps à concevoir en 3D ou en croquis et maquettes. Et comme toutes les vues sont extraites du même modèle, il ne peut plus subsister d’incohérence entre les plans, coupes et façades, et il est extrêmement facile de naviguer dans le projet pour tout vérifier.
L’intérêt du BIM pour les agences
Comme nous l’avons déjà vu, et pour insister à nouveau sur ce point : le BIM représente à la fois un intérêt historique majeur pour nos professions de retrouver leur visibilité et de réintégrer leurs compétences, mais également porte en lui le risque de voir nos prérogatives se réduire encore si nous ne maîtrisons pas cet outil. Nous avons tout à y gagner, d’autant plus que ses intérêts sont nombreux. Et modestement, nous sommes déjà quelques-uns à avoir vérifié ces intérêts.
Le gain de productivité.
Aujourd’hui, où l’on nous réduit sans cesse le temps que nous pouvons consacrer à nos études avec des délais de réalisation de phase très court, le temps est précieux. Et nous tirons collectivement le constat que cette réduction de temps se fait au détriment de la partie consacrée à la recherche et à la conception. Pourquoi? Parce que le temps consacré à la production des éléments graphiques n’est lui que très peu compressible. C’est là que se situe un important gain de productivité. Car, une fois la charte graphique du logiciel réglée conformément à celle de l’agence, le temps de production des documents devient très réduit. Le temps est consacré à la conception en 3D, à la manipulation de la maquette numérique et de ses données, et les pièces graphiques et techniques sont en direct mises à jour car elles sont directement extraites de la maquette numérique. Puis, on peut réutiliser ce processus de travail pour les projets suivants, où avant de débuter la conception, tous les paramètres d’édition des documents sont déjà prêts.
La fiabilisation de la conception, et donc des DCE, et donc du chantier.
Fini le temps où il fallait, pour représenter un élément de projet, travailler sur un document « à plat » et où l’on dessinait d’un coté la coupe, de l’autre le plan, l’élévation, et où on légendait, avec tous les risque d’erreur que cela impliquait, voire les risques de mauvaise conception.
Maintenant, on peut naviguer dans le bâtiment en cours de conception, et travailler sur le même objet en ouvrant différentes vues, préciser la nature des éléments en direct. On manipule des objets en 3D, on ne les représente plus. Et pour vérifier un point particulier, il suffit de faire un zoom, ou une coupe dans la maquette numérique, et l’on peut immédiatement vérifier, et éventuellement choisir de la modéliser plus en détail pour fiabiliser le dossier.
L’intégration des compétences et des données techniques au fur et fur du travail sur le parti
Pour les agences qui travailleront en collaboration avec des bureaux d’études BIM compatibles (et ils le seront vite) et qui auront un niveau avancé de la pratique du BIM (et ce niveau est accessible pour chacun de nous si la mutation est faite avec intelligence), les éléments du projet ne seront plus éparpillés chez les uns ou chez les autres : tout sera intégré sur la même maquette numérique, et chacun des membres de la maîtrise d’œuvre viendra y apporter ses éléments et extraire ceux dont ils auront besoin. Sans revenir sur l’aspect fiabilisation du dossier, fini les erreurs d’indice de plan, terminé la mauvaise compréhension d’une pièce graphique : en cas d’interrogation, chacun pourra naviguer dans la maquette et y trouver les éléments de réponse. Et le BIM manager (dont nous avons parlé avant) fera vivre cette maquette, vérifiera la façon dont chacun y travaille pour maintenir sa cohérence, et suivra en direct les interfaces.
En d’autres termes, chacun des membres de la maîtrise d’œuvre pourra se nourrir de la compétence de chacun, établir une dialogue productif, les projets y gagneront en rythme et en efficacité.
Rendre visible nos savoir-faire.
Pour les projets sur lesquels se met en place un processus BIM avec plusieurs intervenants, la démarche consiste en la mise en œuvre d’une méthodologie de conception intégrée, où seront visibles les compétences apportées tout comme les processus de décision. C’est le processus de présynthèse qui permettra de faire glisser l’importance des décisions plus encore lors des phases de conception, et donc qui permettra de les valoriser.
Pour ceux qui travaillent seuls avec des outils BIM, ils seront en mesure de maîtriser complètement toutes les facettes de leur travail, d’une façon centralisée, et aisément communicable. Ils pourront aussi se servir de cet outil pour capitaliser de plus en plus le temps passé.
La prescription
Les fabricants sont également en train de prendre le virage du BIM. Fini les blocs autocad en 2D d’un coté, de l’autre les fiches techniques et les limites de prescription, ou encore les performances et les descriptifs.
Lorsque vous disposerez une fenêtre dans le projet en 3D que vous concevrez, celle-ci étant la copie virtuelle de la fenêtre réelle, l’objet comprendra à la fois ses dimensions (qui seront paramétrables), ses performances thermiques, acoustiques, son descriptif, et la fenêtre sera directement ajoutée à la nomenclature des menuiseries du projet, tout comme dans ses métrés.
Le club prescrire est à ce sujet à la pointe des initiatives.
La maquette numérique a une valeur.
Cette maquette contenant l’ensemble des données du bâtiment, elle a une valeur intrinsèque, indépendamment du projet que nous concevons. Comme nous l’avons vu avant, la réalisation de cette maquette à des fins de gestion patrimoniale est l’objectif premier du BIM, même si cet outil offre de nombreux intérêts par ailleurs.
Il n’est pas du tout utile de modéliser ou de renseigner en totalité la maquette numérique pour concevoir et construire avec des outils BIM. Un maître d’ouvrage qui souhaitera bénéficier de données exhaustives compatibles avec ses objectifs de gestion patrimoniale devra demander une prestation complémentaire. Prestation qui ne fait pas partie, par nature, du panel de nos missions. Et il est maintenant évident que dans notre société, les données vont avoir de plus en plus de valeur. Mais nous y reviendrons.
Renforcement des compétences, voire leur réintégration
Comme nous l’avons déjà vu, nous ne dessinerons plus un bâtiment, nous le concevrons et visualiserons ses éléments par des vues qui seront éditées à partir de la maquette numérique. En d’autre terme, cela va par nature renforcer la compétence de nos agences, puisque même pour construire virtuellement un mur, il faudra s’intéresser à sa nature même, ainsi qu’à ses interfaces.
Nous produirons une architecture, dans toutes les acceptions de ses termes, car les éléments que nous concevrons seront directement utilisés par nos partenaires pour dimensionner, déterminer la performance thermique, quantifier, alimenter en réseaux, etc. Nous ne devons pas devenir des spécialistes, mais serons en mesure de mettre en perspective, et d’intégrer ces richesses constructives à nos volontés architecturales.
Les étapes pour devenir BIM Compatible, et définir son niveau d’exercice.
Nous l’avons vu, la dernière étape pour maîtriser le processus BIM est d’assurer la fonction de BIM manager du projet, et plus la taille de l’agence est petite, et plus les projets sont simples, plus la mutation est rapide car les gains de productivité sont quasi immédiats et l’interopérabilité est simple à gérer. Mais assurer cette fonction de BIM manager nécessite d’être passé par d’autres phases, et il n’est pas forcément nécessaire d’être BIM manager pour être BIM compatible. Tout dépend donc de là où chaque agence souhaite mettre le curseur.
Voyons d’une manière simplifiée, quelle sont les différentes étapes.
1. Se passer des logiciels 2D, et passer à la 3D sur un projet, puis deux, puis sur tous.
Rappelons-le : ces logiciels en 2D n’ont jamais été que des logiciels de dessin. Même s’ils comportent certains attraits par rapport à la planche à dessin, comme la fonction copier-coller, ils ne présentent aucune fonctionnalité métier. Et pour modifier le projet, il faut modifier, traits à traits, et sur chacune des vues concernées la représentation graphique de ce qui est modifiée. C’est rébarbatif, peu productif, générateur d’erreurs, et pas évolutif. Même sans parler BIM, il n’y a aujourd’hui plus aucun intérêt, ni en terme de qualité de processus, ni en terme de productivité, de se servir de logiciels en 2D.
Il faut donc s’en séparer et ne les utiliser qu’à la marge : pour représenter des détails, travailler un plan de géomètre en import, etc. Mais il est impératif de passer en 3D. D’ailleurs, notre matière première n’est-elle pas l’espace, la lumière. Qu’à à faire la 2D la dedans ? Rien, du moment que les outils en 3D existent.
Et il en existe de différentes sortes plus spécifiquement dédiés aux architectes. Du plus simple, Sketchup, assez pratique pour commencer à explorer les façon de passer directement des croquis à la 3D, mais qui ne permet pas ensuite de passer à des échelles de travail plus précises et d’intégrer toute la puissance de la conception en 3D… aux plus performants, dont Revit, Archicad, Allplan ou encore Microstation, qui sont certes plus coûteux, mais également beaucoup plus puissants et adaptés. Investir tout de suite dans un logiciel puissant permet également de découvrir quelles en sont les potentialités, et donc de passer plus aisément à la phase suivante. Nous aborderons cela plus précisément dans un prochain numéro de PA.
2. Anticiper le passage au BIM compatible, en mutant vers des logiciels qui le sont, pour appréhender l’outil et prévoir les investissements
Rappelons le : la maquette numérique est un modèle 3D dans lequel sont intégrés toutes les données du bâtiments, et pas seulement celles liées à sa géométrie.
Pour ceux qui auront choisi de débuter la 3D par des logiciels n’étant que des modeleurs géométriques, il faudra, avant de travailler sur des projets au BIM, bien comprendre par la pratique ce que cela implique en terme d’organisation, de management, et de gestion des données. Il leur faudra donc passer sur des logiciels 3D déjà opérables en BIM, ne serait-ce que pour manipuler correctement les outils 3D avant de devoir enrichir le projet de données complémentaires.
Par exemple, cette phase intermédiaire permet de tester des processus de conception partagée au sein d’une même équipe, où différentes personnes travaillent simultanément sur la même maquette numérique. Maquette dont le fichier est localisé sur le serveur de l’agence. Tester à blanc cette manière de travailler permet de se préparer correctement à travailler ainsi avec d’autres partenaires extérieurs, et également, vous l’imaginez aisément, gagner en efficacité…. trois personnes qui modélisent sur un même fichier sont plus efficaces que trois dont l’une fait les plans, l’autres les façades, et l’autres les coupes, non ? Sans compter la fiabilité du résultat…
Cette phase est très importante car elle permet de tester, tout en gagnant de façon significative en productivité. Elle permet également à l’agence de poursuivre son travail de consolidation autour des processus 3D, avant que le BIM ne soit exigé par les maîtres d’ouvrage. C’est pour cela qu’il est urgent de ne pas attendre.
3. Passer de la conception 3D au BIM compatible
Ce passage est plus délicat, mais il peut s’opérer simplement s’il est bien préparé. Sans aller dans le détail cette fois, car cela doit faire l’objet d’une présentation précise, il s’agit d’ouvrir son processus de conception en 3D aux autres partenaires de la maîtrise d’œuvre, puis aux entreprises, et enfin aux utilisateurs. Et ceci dans l’objectif à la fois de concevoir d’une façon collective sur un même fichier, mais également de livrer une maquette numérique adaptée au cahier des charges du client.
Les questions qui se posent, vous le devinez sans doute, trouvent des réponses particulières pour chaque projet : définir les responsabilités de chacun, protéger son savoir-faire concurrentiel, garantir la fiabilité des données, définir le détail du processus de façon collégiale et en fonction des compétences en BIM de chacun.
Ce passage nécessite d’effectuer des formations spécifiques, de déployer un business plan adapté à sa structure et à son fonctionnement (de raisonner investissements et non plus dépenses), de réfléchir à la définition des postes de chacun, de s’entourer de partenaires BIM opérables, et d’être en mesure de savoir valoriser la prestation.
Sur tout cela nous reviendrons dans un prochain article, également pour vous aider à y voir plus clair. Même si pour ceux qui seront parvenus à faire muter leur agence au niveau du point 2., cela semblera assez simple et évident.
4. Assurer la fonction de BIM Management
Sans revenir sur le contenu de cette fonction : il sera alors possible d’assurer à la fois la mission de maîtrise d’œuvre classique, et celle de fournisseur des données techniques complètes du projet. Elle aura alors toute latitude pour déployer toute l’étendue de ses compétences.
Les erreurs à éviter
Comme nous l’avons vu, le BIM ne consiste pas à juste changer de logiciel, il s’agit surtout d’une belle mutation. Et si cela peut être assez simple, il existe certains pièges à éviter.
1. Y voir quelque chose de compliqué, ou de très simple
C’est bien entendu le meilleur moyen de créer de la complexité. Cet outil, je le rappelle, peut être à l’image de la façon de concevoir de l’agence. Si l’on imagine que le processus BIM sera compliqué… c’est quasi certain, il le sera ! Et de la même façon, croire que le BIM n’est qu’un outil 3D, c’est à la fois se priver de sa puissance, et perdre l’intérêt d’investir.
2. Foncer tête baissée, et muter toute son agence d’un coup
C’est le meilleur moyen de faire caler l’activité de son agence…. Pour muter, que ce soit de la 2D vers la 3D, puis de la 3D vers le BIM fermé et ensuite ouvert, il faut choisir un projet pour s’y consacrer. Et un projet, c’est une commande, une équipe à choisir et à former, et des moyens à y consacrer. La taille du projet n’est pas importante. Il faut plutôt le choisir en fonction de sa capacité à évoluer de façon fluide et du caractère non urgent des études. De façon à pouvoir organiser les formations, mobiliser les équipes…. et à pouvoir perdre un peu de temps de façon constructive, et faire des retours d’expérience. Le gain sera alors important dès les projets suivants.
3. Déléguer la mise en place du BIM à des collaborateurs
Le BIM, ou encore la conception 3D en réseau, est affaire de processus, et donc d’organisation d’agence. La mutation est vouée à l’échec l’on se contente de former ses équipes aux seuls logiciels. Il est également impératif d’adapter le mode de management de l’agence, et que ce nouveau mode ait été soit validé, soit porté par ses associés. Seule leur intime conviction des gains permettra d’éviter la fâcheuse tendance du retour en arrière vers les logiciels en 2D dès que les premières difficultés se présenteront.
4. Ne pas se faire accompagner par des spécialistes
Faites vous accompagner dans le choix des logiciels qui conviennent le mieux à votre activité, à l’état de votre parc matériel existant, ainsi qu’à vos ressources humaines. Pour mémoire, le déploiement du BIM se fait à la carte, et en fonction des capacités et des motivations de vos équipes à s’emparer d’une partie de la mutation. Certaines auront plus de difficulté à appréhender le côté managérial, d’autre la façon de modéliser. Certaines voudront externaliser la modélisation des objets 3D où les trouver sur e-catalogues, d’autres voudront conserver leur autonomie de prescription en étant en mesure de concevoir leurs propres objets. Et comme souvent en pareil cas, la décision d’accompagnement est souvent un savant mélange entre réaliser en interne ou par le biais de prestataires extérieurs.
5. Ne pas se former, ni former
Faut-il encore le rappeler…..
6. Considérer que le BIM fait partie de nos missions actuelles
Quitte à insister encore : la réalisation d’une maquette numérique qui contient l’exhaustivité des données nécessaires à la gestion du patrimoine ne fait pas partie de nos missions actuelles. Et ceci de façon claire. La quantité de travail est importante, et ne supporterait aucun rabais et encore moins d’être intégrée dans nos forfait d’honoraires actuels…
Mais surtout, il ne s’agit pas du même type de mission. Il ne s’agit plus de devoir de conseil, mais bien de fourniture de prestation sur laquelle sera adossée une garantie de résultat.
7. Considérer qu’il faut un bagage technique important
Vous savez concevoir un projet, le traduire en détails et en prescription, suivre un chantier, et livrer un bâtiment ? Alors vous saurez sans difficulté travailler BIM, car il ne s’agit « que » de la version numérique du projet réel, et cette version numérique se construit selon les mêmes règles.
8. Ne pas adapter la décomposition de ses missions.
L’effort n’est plus réparti selon la même courbe que pour les phases actuelles. Le temps passé en esquisse est beaucoup plus important, puis devient pour l’APS et l’APD (missions dont les contenus se rapprochent). Il faut essayer d’adapter la répartition des honoraires en fonction, et la plupart des maîtres d’ouvrages l’acceptent dès lors qu’ils en comprennent la pertinence. C’est aussi pour éviter un trop gros décalage entre le travail fourni dès le début de la mission et des honoraires mal répartis, qu’il faut débuter par un premier projet, de façon à limiter l’impact sur la trésorerie.
Les actions de l’UNSFA
Déjà moteur lors du passage des planches à dessin vers les outils de dessin informatique, l’UNSFA met là encore tous les moyens pour anticiper et accompagner nos agences dans cette profonde mutation à venir et dans les opportunités que cela va engendrer.
Médiaconstruct
Il s’agit de la représentation française de Building Smart International, organisation qui travaille depuis de nombreuses années sur la norme IFC, norme devenue ISO depuis un an environ. Il s’agit de seule norme ouverte qui permettra à tous les logiciels de dialoguer entre eux – et indépendamment des langages propres à chacun d’eux – et de garantir la fiabilité des données que nous échangerons et que nous livrerons à nos maîtres d’ouvrage, à l’instant mais également pour une longue durée.
L’UNSFA dispose d’un siège de vice-présidence dans son conseil d’administration.
BIM prescrire
Le club BIM Prescrire regroupe des industriels qui ont pour volonté de faire muter leurs outils actuels d’aide à la prescription vers des outils BIM (où les objets que nous importerons dans nos maquettes numériques contiendront l’ensemble des données nécessaires). Cette action est fondamentale pour tous, et en particulier dans l’enjeu de pouvoir disposer de bases de données d’objets numériques fiables et libres de droit.
Congrès UNSFA 2014
Le BIM étant un enjeu important, ainsi qu’une de nos priorités, une part importante lui sera consacrée au congrès 2014, avec notamment la présentation d’exemples concrets de réalisations portées par des membres de l’UNSFA, et des communications sur la mise en place du BIM par des témoignages de déploiement dans des agences.
La formation
Par le biais du GEPA en particulier, et pour des formations précises, il vous est déjà possible d’apprendre ce en quoi consiste le BIM management, ainsi qu’à certaines de ses déclinaisons. Mais également par le biais d’une formation plus poussée dans le cadre du Master spécialisé BIM et co-fondé par l’Ecole des Ponts Paristech et par l’ESTP, et initiée par Mediaconstruct.
Avant de se donner rendez-vous dans un prochain numéro pour développer plus en détail certains aspects, vous l’aurez compris : le BIM est un accélérateur et un révélateur des compétences de nos agences.
Il s’agit d’une très belle opportunité de repositionner l’acte de construire au centre de nos pratiques, sans nuire à la qualité architecturale, et en mettant en valeur la richesse et la spécificité de nos métiers. Et le BIM n’étant rien d’autre que la copie virtuelle du projet, chaque architecte est évidemment en mesure de s’approprier ce nouveau paradigme de production. Mais comme tout progrès, il lui est aussi attaché un risque : celui que les architectes ne soient pas en mesure de répondre à la demande des maîtres d’ouvrages et que ceux-ci confient à d’autres le soin de leur fournir ces données, voire de piloter la réalisation de cette maquette numérique.
Pour conclure, du moins en ce qui concerne cet article, car les échanges seront je l’espère nombreux, il me semble important de souligner à nouveau deux aspects fondamentaux. Le premier est que nos missions actuelles consistent en un processus qui permet la livraison d’un ouvrage, processus auquel est adossé un devoir de conseil. L’établissement et la fourniture des données numériques ne font pas partie de nos missions actuelle, et à cette fourniture est assortie un résultat, et ces données auront une réelle valeur et seront donc valorisables en plus des missions actuelles. Le second est que nous devrons, nous architectes, être en mesure de piloter le processus de conception au sein de la maquette numérique pour assurer qu’il soit compatible avec l’émergence d’une architecture de qualité : et pour cela il faut faire entrer nos agences dans l’ère du numérique, en commençant par apprendre à se passer de tous les logiciels en 2D.
Pour le reste, tout comme Monsieur Jourdain découvre surpris qu’il fait déjà de la prose sans le savoir, je suis persuadé que nous, architectes, faisons du BIM sans le savoir depuis toujours, et que nous allons enfin disposer des logiciels adéquats.
Thibaut ROBERT,
Architecte et BIM Manager
Responsable NTIC de l’Unsfa en charge du BIM, futur vice-président de Médiaconstruct
[1] voir wikipedia / intéropérabilité