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Pourquoi les politiques gouvernementales en termes de rénovations énergétiques sont-elles systématiquement vouées à l’échec ?

Cela fait des dizaines d’années que des dirigeants politiques nous annoncent que, cette fois c’est la bonne, on va enfin rénover massivement le bâti ancien en France. Ce qui va nous permettre de relancer l’économie, le secteur de la construction, créer des emplois, valoriser notre patrimoine et, cerise sur le gâteau, permettre de réduire les factures énergétiques des français tout en augmentant l’indépendance énergétique de notre pays. Le message est motivant et fait plaisir à tout le monde : propriétaires, écologistes, artisans et industriels de la construction.

Mais pas de chance, à chaque fois, les annonces passées, le soufflé retombe. Et cela se termine avec des articles dans la presse nous expliquant comment Mme  Michu s’est faite avoir par les promesses alléchantes d’un vendeur de pompes à chaleur, dépensant sans compter et surtout,sans réel espoir de retour sur investissement.

Le court-terme comme seul moteur

A l’origine du problème est le besoin des politiques d’offrir un résultat rapide et massif, en moins d’une mandature. Tout simplement du fait qu’il y a nécessité à rendre son action visible en vue d’être réélu. Massif, ce mot est dans toutes les bouches. Même les plus écologistes de nos politiques, quelles que soient leurs appartenances politiques, veulent que les résultats soient rapides et spectaculaires. Mais pas de chance : rapide et spectaculaire, c’est l’inverse du sur-mesure, de tenir compte des envies et des besoins des propriétaires, de résultats concrets économiques et positifs.

Les intérêts des protagonistes

Même patient et plein de bonne volonté, le dirigeant politique a besoin de spécialistes du métier pour le conseiller sur les actions concrètes à mener. Les représentants des industriels, artisans et architectes vont donc être reçus pour donner leurs idées d’actions à mettre en œuvre.

Chaque industriel ne va chercher qu’à tirer la corde vers son secteur d’activité : crédit d’impôt sur les chaudières, sur les pompes à chaleur, sur les fenêtres… Le résultat n’a pas vraiment d’importance, il faut juste faire du chiffre, ça fera tourner l’économie et ça sera « massif » ! Comme ce sont les voix les plus puissantes, et que leur message est simple, ils gagnent souvent la prise en considération des autorités.

Les artisans vont demander des aides simples à mettre en œuvre (c’est positif) sur des travaux simples à mettre en œuvre (ça l’est moins). Du coup l’aide au remplacement des chaudières et des fenêtres se développe. Tant pis si les résultats concrets en terme d’économie d’énergie et de retour sur investissement seront, au mieux, médiocres.

Les architectes, quant à eux, demandent une réflexion globale, la prise en compte des énergies grises, la prise en compte des besoins des habitants, des aides simples à mettre en œuvre, la valorisation du patrimoine. Mais, malheureusement, ce discours est trop compliqué à entendre, et puis le sur-mesure c’est quand même l’antithèse de la massification.

La complexité des aides

Pour un seul projet de rénovation, on va essayer de frapper à toutes les portes pour obtenir des aides. Et là, c’est la jungle : prêts bonifiés, crédits d’impôts, TVA à taux réduits, aides directes des collectivités locales ou de l’Anah, Contrats économies d’énergies. Avec tout ça on va bien en avoir quelques-unes !? En réalité, malgré toutes les bonnes volontés et malgré l’aide des Espaces Info Energies (EIE), c’est le parcours du combattant. Tantôt le particulier sera au-dessus des seuils en terme de revenus, tantôt l’aide ne s’appliquera pas aux travaux envisagés, tantôt les conditions de l’aide seront modifiées juste avant le lancement de l’opération. Et quand enfin une aide s’applique, on apprend qu’il faudra remplir de multiples formulaires, produire d’innombrables justificatifs pour gagner 50€ de subvention sur un budget de 150 000 € de travaux.

Au final l’aide la plus efficace reste la TVA à taux réduit. C’est un coup de pouce visible et qui reste le plus simple à appliquer. Et encore, même ce soutien n’est pas pleinement utilisé sur les travaux complexes. Il suffit de regarder les devis des plâtriers qui préfèrent tout passer en TVA à 10%, alors que l’isolation intérieure peut passer à 5,5%. Cela de peur de faire une erreur entre, par exemple, une contre-cloison dont l’isolant servira thermiquement et une autre dont l’isolant n’aura qu’une utilité acoustique.

La réaction des particuliers comme des professionnels peut se résumer en une phrase : « Quand c’est compliqué, on laisse tomber ! ».

Alors quelle est la solution ?

Face à une situation aussi complexe, il faut mettre en œuvre quelques solutions simples, lisibles et surtout efficaces :

  • Encourager les particuliers à passer par le professionnel de la rénovation qu’est l’architecte. Car de lui-même, parce que c’est son cœur de métier, l’architecte dirigera les moyens financiers vers les mesures les plus efficaces. Un euro d’aide pour passer par un architecte, c’est un euro dont on sera sûr qu’il sera utilisé efficacement avec des résultats concrets et durables.
  • Réduire le nombre d’aides, réduire leur complexité, supprimer les conditions de ressources ou de localisation. Un exemple de mesure très simple et très efficace pourrait être l’application automatique de la TVA à 5,5% sur l’ensemble des travaux de rénovation dirigés par un architecte, cela en remplacement de toutes les aides existantes.
  • Augmenter le nombre d’architectes formés en France, afin de rattraper le retard important que l’on a par rapport aux autres pays européens.

Florian Stoffel

Architecte

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