De nombreuses collectivités pensent qu’en recourant aux SEM à Opération Unique, elles vont éviter les dé-rives d’un PPP et s’affranchir des règles de la commande publique qu’elles trouvent trop complexes, mais elles oublient que celles-ci ont été mises en place pour les protéger.
Alors que la gestion de l’argent public oblige à une probité de concurrence, de procédure, de transparence, d’égalité d’accès à la commande et de contrôle pour des dépenses de quelques milliers d’euros, les collectivités vont faire semblant de respecter les règles et vont, en fait, les contourner pour des contrats globaux qui peuvent représenter plusieurs millions d’euros !
Pour prendre un exemple, quand les règles à respecter sont celles du code des marchés publics, son article 5 prescrit : « La nature et l’étendue des besoins à satisfaire sont déterminés avec précision avant tout appel à concurrence ». Ces dispositions sont ensuite largement développées dans les articles suivants du CMP, notamment du n°11 au n°13.
Or, au moment de mettre en concurrence les candidats à l’association au sein d’une future SEMOU, c’est le « document de préfiguration » (qui décrit principalement le fonctionnement de la SEMOU) qui va tenir lieu de cahier des charges.
Quelle valeur aura l’engagement pris par le candidat retenu puisque ce n’est pas lui qui sera, in fine, titulaire du contrat conclu par la collectivité en vue de la réalisation de l’ouvrage (d’ailleurs encore à concevoir), mais la SEM qui lui sera substituée et dont il ne sera qu’un associé (art L1541-3-VI nouveau) ?
En fait, nous doutons qu’aucune procédure de la commande publique ne soit adéquate pour choisir un lauréat, non pas pour exécuter l’objet d’un marché, mais pour être « jugé digne » d’entrer financièrement dans une SEM.
Le flou sur les engagements sera tout aussi dangereux lorsqu’il s’agira de contrats de longue durée. Les cahiers des charges, qui doivent prévoir la gestion à long terme et l’évaluation permanente du respect de la qualité du service promis, seront particulièrement difficiles à mettre au point.
On peut en outre s’inquiéter des moyens dont la collectivité disposera pour contrôler, gérer et éventuellement sanctionner la mauvaise exécution d’un contrat par une SEM dont elle sera elle-même actionnaire.
Nous nous interrogeons aussi sur le silence de la proposition de loi sur la façon dont l’opérateur privé pourra récupérer (avec les intérêts) au cours du contrat son investissement originel dans le capital de la SEMOU, puisque celle-ci n’a pas vocation à survivre à la réalisation achevée.
Qui va pouvoir accéder à ces SEMOU si ce ne sont les grands groupes, les seuls à apporter les garanties financières nécessaires ?
Que deviendront les entreprises locales, terreau de l’économie des régions ? Sont-elles condamnées à disparaître et avec elles les emplois locaux induits ?
Les élus s’inquiètent de la paupérisation de leurs départements, mais ils y contribuent aujourd’hui en recourant aux PPP et demain aux SEMOU.
Il faut convaincre nos dirigeants de l’aberration de ces systèmes. C’est une orientation totalement en contra-diction avec les annonces du gouvernement visant à favoriser l’accès à la commande des PME et TPE.
Pour la maîtrise d’œuvre, et plus particulièrement les architectes, en SEMOU comme en PPP, nos clients ne sont plus les collectivités mais l’entreprise et ses actionnaires.
Comment pourrons-nous défendre à la fois les intérêts de la collectivité et de notre client, l’entreprise ?
Les architectes veulent défendre l’intérêt des citoyens, dans le respect de la Loi sur l’Architecture.
Ils doivent pour cela être indépendants de l’économie d’entreprise.
Pour ces différentes raisons, l’Unsfa confirme et affirme son opposition à la création des SEM à Opération Unique
-> Lire l’article du Moniteur sur les SEM à Opération Unique.